Michelle Kasprzak

La perte de sens à partir de la plasticité de la voix dans une pratique de manipulation technologique

Ce texte d’accompagnement décrit les qualités humaines du dévouement et de l’action répétitive, ainsi que la façon dont elles sont reliées à l’usage unique de la voix humaine en relation avec la technologie. Dans le contexte de la performance, l’objectif est d’accomplir la performance « idéale ». Par contre, les erreurs et les défauts qui résultent du manque de virtuosité de la part du performeur révèlent certains aspects liés aux outils et au processus utilisés par le performeur qui peuvent éclairer davantage le spectateur que dans l’éventualité de la réussite d’une performance parfaitement exécutée.

Dans «Perform or Else», Jon Mckenzie décrit la relation entre la performance culturelle, organisationnelle, et technologique. La performance culturelle représente l’art performatif même et l’étude académique de la performance; la performance organisationnelle représente le monde corporatif et ses exigences vis-à-vis les travailleurs qui performent dans son système; finalement, la performance technologique représente la performance des machines, de laquelle nous dépendons pour fonctionner quotidiennement. McKenzie soutient que cet ordre implicite, «perform or else», supporte toutes les qualités de la vitesse et de la tension de l’existence contemporaine; vous devez performer ou vous serez remplacés.

Dans ce texte, je décris le défi «perform or else» en relation à la pratique obsessive et répétitive de l’entraînement d’un ordinateur à la compréhension de ma voix. J’utilise le Stenomask, un dispositif de mutisme de la voix, pour faire des lectures concernant certains aspects de la communication orale et traitant aussi de la poétique de la répétition. Ils sont traités par l’ordinateur et basés sur sa compréhension limitée de ma voix. La production d’un texte en temps réel en résulte. Celui-ci fournit au spectateur une transcription erronée de la conférence. Le texte révèle les difficultés de l’ordinateur à me comprendre, ainsi que mes propres erreurs, auxquelles je suis vouée à accepter en tant qu’utilisatrice humaine.

Ma performance réfère aussi à d’autres pratiques qui dépendent lourdement de la répétition, du dévouement, et d’une gestualité obsessive comme valeur essentielle, tel que la fauconnerie, la peinture minimaliste, l’amour et le système judiciaire. Par ce texte, ainsi que par mes performances, je propose l’argument que le dévouement obsessif à une tâche, malgré son intention d’atteindre la perfection, n’arrive jamais à sa fin – plutôt, il atteint un état de création erronée, toutefois transcendant, où le créateur développe une technique par laquelle il crée les plus minimes résonances entre plusieurs itérations performatives résonnantes de significations. Les pertes entre ces itérations sont célébrées comme des parties intégrales du processus de découverte de la part du créateur, et font aussi partie du développement d’une identité unique à chaque performance, même si le texte d’origine demeure le même.

Directeur de recherche : Éric Raymond